Enfance, mon enfance
J'ai peint en bleu toute la fenêtre
Pour faire croire que le ciel est si beau
Qu'on fond de mes yeux, il s'y reflète
Pour me rendre heureux, adoucir mes maux.
J'ai peint en rose dessous la fenêtre
Pour faire croire qu'il y a là des fleurs
Qui embellissent mes jours, et peut-être,
Embaument mes peines d'un voile de douceur.
Enfance, mon enfance
Tu n'es pas conte de fées,
Je vis dans la souffrance
De ne pas être aimé.
J'ai peint en jaune le reste du mur
Pour faire croire que le soleil brille encore
Même si pour moi, il n'est pas sûr
Qu'il puisse encore réchauffer mon corps.
J'ai peint en vert tout le plancher
Pour faire croire que l'herbe pousse chez moi
Où je peux, comme dans un champ, m'allonger
Et chercher le trèfle qu'il n'y a pas.
Enfance, mon enfance
Où es-tu donc passée,
Seul dans l'indifférence
Je ne peux que rêver.
J'ai mis en marron le mur d'à côté
Pour faire croire à un grand jardin
Où, par cette terre, jamais labourée,
Je peux m'échapper chaque matin.
J'ai peint en rouge le mur d'en face
Pour faire croire au vent qui va se lever
Et qu'il fera beau, même si la glace
Me fend le coeur pour mieux m'enfermer.
Enfance, mon enfance
Je ne garde de toi
Que l'ombre qui avance,
Menaçante, vers moi.
J'ai peint en gris la porte d'entrée
Pour faire croire à la couleur de la rue
Où un jour de grand froid, s'est échappée
L'enfance que je n'ai jamais eu.
J'ai peint en blanc et gris ce pan de mur
Pour faire croire à la brume du matin
Qui pénètre ma vie, voile obscur
Qui me rend triste, qui me rend chagrin.
Enfance, mon enfance
Tu n'étais pas cadeau
Quand j'avais en souffrance
La ceinture sur le dos.
j'ai peint en noir l'immense plafond
Pour faire croire que c'est la nuit qui tombe
Et qui m'enveloppe, sommeil profond,
Déjà mon corps s'enfonce dans la tombe.
J'ai mis du blanc dans mes cheveux d'enfant
Pour faire croire aux années qui passent...
Moi qui n'ai encore que juste dix ans,
Pauvre jeunesse, rêves qui se cassent.
Enfance, mon enfance
Pour toi, bien trop longtemps
J'ai versé, en silence,
Toutes mes larmes d'enfant.
J'ai mis tant de couleurs sur mes peines
Pour faire croire qu'elles n'existaient pas...
Pas de tendresse, pas un "je t'aime",
Seulement la main qui s'abat sur moi...
J'ai mis tant de couleur sur mes rêves
Pour faire croire que je n'ai fait que rêver
Et pour dire, avant que ma vie s'achève,
Qu'enfant un jour, pourtant, j'ai été.
Enfance, mon enfance
Je t'ai vécu, un jour,
Comme une délivrance
Quand j'ai connu l'amour.
Enfance, mon enfance
J'en parle peu aujourd'hui,
Non par indifférence,
Mais parce que j'ai grandi.
( extrait d' Il est le temps d'aimer... )
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