La maison abandonnée
J'ai poussé la porte sur un passé
Si lointain que se gomment toutes traces.
Une porte d'une maison laissée
Aux herbes folles dans le temps qui passe.
Sur la terre battue restait gravé
Le pas pesant de l'homme au front, parti
Et l'âcre odeur du tabac transpirait
Des murs en torchis, du plafond noirci.
Il y avait dessus la cheminée,
Un enfant, sur une photo jaunie
Posée tout contre un crucifix cassé
Et d'un bouquet séché de buis béni.
Il y avait un vieux seau à charbon
A côté d'une vieille cuisinière,
Une chemise et un vieux pantalon
Sur un bahut recouvert de poussière.
Placé au fond, dans le coin le plus sombre,
Un lit ouvert à se perdre dedans
Et sur le mur comme une trace, une ombre,
Un vieux tableau décroché par le temps.
Il y avait sur la pierre à évier
Une cuvette, un savon noir dedans,
Un torchon sale, serviettes tachées,
Une lessive à faire, qui attend.
Il y avait un banc de renversé,
Une table aussi longue qu'un hiver
Et dessus, un verre tout ébréché
Et un journal qui parlait d'une guerre.
Et point de bruit, que le parfait silence
D'un passé proche en partie oublié.
Une âme envolée dans l'indifférence,
Le temps souvent efface les années.
Vite petit, repousse cette porte,
Pour ne pas que s'envole la mémoire
D'un siècle fait d'années longues et mortes
Qui ont forgées et forgent notre histoire.
Vite petit, referme cette porte
De cette maison sortie de l'oubli.
Ferme les volets, que te réconfortent,
Au fond de tes yeux, ces perles de pluie.
( extrait d'A l'ombre de mes rêves... )
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